Lourdes est si chère au pape François
Jacques Perrier : «Lourdes est si chère au pape François»
Avec la parution de son nouvel ouvrage sur Lourdes aux éditions de l’Harmattan, l’évêque émérite de Tarbes-Lourdes Jacques Perrier nous revient, plus fringant que jamais.
«Lourdes dans l’Histoire» : c’est le titre du nouveau livre de l’ancien «gardien de la grotte» qui nous a accordé une interview en primeur.
Pouvez-vous nous expliciter simplement ce que vous avez voulu montrer dans ce nouvel ouvrage ?
Mon point de départ est un constat. Depuis les travaux du père Laurentin, nous savons tout sur l’époque des Apparitions, en 1858. Ceux qui sont un peu plus au courant ont entendu parler du «pèlerinage des bannières», en 1872. Ensuite, c’est le trou noir. Du centenaire lui-même, en 1958, ne reste aucun des acteurs importants. La curiosité m’a donc poussé à travailler sur Lourdes à travers l’Histoire. Je ne voulais pas refaire la chronique des événements, en particulier des constructions, année par année : pour une bonne part, ce travail a été accompli par Mgr Branthomme et Mme Touvet. En prenant divers points de vue (53 au total), je voulais voir comment les choses avaient évolué sur plus d’un siècle et demi, alors que tout l’environnement a tellement changé ! C’est ce qui explique le titre du livre : «Lourdes dans l’Histoire» (et non, l’histoire de Lourdes) et son sous-titre : «Église, culture et société». Il y est question de la liturgie, mais aussi du cinéma, des guerres, du rapport avec Rome. Le résultat de l’étude, c’est que Lourdes a évolué, mais sans rupture.
En quoi Lourdes est-il un sanctuaire différent des autres ?
Dans le folklore populaire, Lourdes est identifiée au miracle. En réalité, il n’est jamais question des malades dans les Apparitions. L’originalité, c’est la parole de la «dame» : «Je suis l’Immaculée Conception». Quatre ans plus tôt, le pape Pie IX avait proclamé l’Immaculée Conception de la Vierge. Cette convergence entre un dogme et le message confié à un(e) voyant(e) ne s’est jamais produite depuis vingt siècles que l’Église existe. Cela dit, les malades ont accouru à Lourdes dès que la source fut découverte. Des milliers d’entre eux furent guéris. La présence des malades et le phénomène des guérisons ont dessiné deux traits originaux de Lourdes : le bénévolat sous la forme des Hospitalités et une instance médicale, sous la forme du bureau des constatations. Il faut ajouter la personnalité extrêmement attachante de sainte Bernadette. Elle a 14 ans au moment des Apparitions ; elle quitte Lourdes à 22 ans et elle meurt à Nevers, à 35 ans. Elle parle donc tout particulièrement aux jeunes : leur présence est aujourd’hui aussi caractéristique de Lourdes que celle des malades. D’ailleurs, bon nombre sont au service des malades.
Qu’est-ce qui vous pousse à écrire encore sur Lourdes, en dehors de votre titre d’évêque émérite ?
L’évêque dit «émérite» reste, jusqu’à sa mort, membre du diocèse dont il était l’évêque. Je fais donc toujours partie du diocèse de Tarbes et Lourdes. Pour écrire ce livre, il m’a fallu trois ans, sans chômer, alors que j’avais la réputation d’être plutôt rapide. Pour trouver ce temps, il faut être retraité. J’espère que ce livre rendra service pour une meilleure connaissance de Lourdes. Mais je souhaite, plus largement, qu’il aide à comprendre, sur un cas particulier, ce qu’est la tradition dans l’Église : l’invention dans la fidélité.
Comment voyez-vous l’avenir du sanctuaire de Lourdes inscrit dans les perspectives tracées par votre ouvrage ?
Il y a toujours eu des gens pour dire qu’autrefois, c’était mieux. Mais les responsables des Sanctuaires n’ont jamais cédé à cette tentation. Lourdes n’est pas un monastère. C’est un haut lieu de la piété populaire si chère au pape François. L’Église y est visible et accessible. Nul ne repart de Lourdes sans y avoir trouvé quelque chose.
L’évêque aux deux papes
Né en 1936, Jacques Perrier est un évêque à la personnalité à la fois charismatique et atypique. Son ouverture intellectuelle qui épouse parfaitement l’esprit de la grotte de Massabielle en fait sans doute l’un des évêques les plus marquants de l’histoire de Lourdes. C’est sans doute aussi pour cela que l’ancien prêtre de Paris et évêque de Chartres (1990-1997), puis de Tarbes et Lourdes (1997-2012), a reçu dans la cité mariale deux papes : Jean-Paul II (2004) et Benoît XVI (2008), à l’occasion du 150e anniversaire des Apparitions.
Propos recueillis par Cyrille Marqué
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