Une rose au milieu des épines

Les responsables des Sanctuaires de Lourdes a eu la joie d’accueillir le 77ème patriarche d’Antioche et de tout l’Orient, pour la fête de la Nativité de Marie. Successeur du cardinal Nasrallah Sfeir – venu à Lourdes en avril 2005 – Sa Béatitude Béchara Raï, élu en mars dernier à la tête de l’Eglise Maronite, arrivait de Paris où il avait été l’invité du président de la République, comme le veut une tradition séculaire qui lie d’amitié la France et le Liban depuis le Moyen Age.

Entouré de plusieurs évêques maronites, dont Mgr Saïd Elias Saïd, chorévêque maronite en France, et des représentants de la communauté locale d’origine libanaise, le patriarche a célébré la messe en langue arabe et en rite syriaque dans la basilique Notre-Dame du Rosaire, avant de guider la procession vers la grotte de Massabielle pour l’Angélus. L’émotion a notamment saisi l’assemblée quand Sa Béatitude a prié pour tous les chrétiens persécutés en raison de leur foi dans les pays dictatoriaux ou théocratiques du Moyen-Orient, invoquant la protection divine sur le Liban où les communautés de diverses confessions vivent en paix, à la faveur d’un pacte démocratique qui constitue une exception dans « l’Orient compliqué ». Le 25 mars, fête de l’Annonciation si importante dans le message de Lourdes (la révélation du nom de la Dame), est une journée chômée au Liban, marquant l’amour pour la Vierge Immaculée qu’ont en commun les chrétiens et les musulmans.

L’après-midi de ce 8 septembre Mgr Béchara, dont le nom signifie « Annonciation », participait à une table ronde à la mairie de Lourdes, en présence des autorités civiles et de Mgr Jacques Perrier, le Gardien de la Grotte. « Nous sommes comme une rose au milieu des épines » a déclaré le patriarche à la veille des 10 ans du « 11 septembre », évoquant les bouleversements en Irak, en Egypte, en Lybie, et en Syrie, qui risquent de bénéficier aux fondamentalistes et de conduire peut-être à une partition du monde arabe en états confessionnels, certains en Israël revendiquant aussi leur religion comme socle identitaire national… « Nous comptons toujours sur la France des libertés pour favoriser des transitions politiques respectueuses de la dignité des personnes et du pluralisme, et pour protéger les chrétiens de nos pays trop souvent contraints à choisir entre la valise ou le cercueil », a souligné en substance le chef religieux, personnalité de grande envergure, déjà reconnue par les leaders libanais, chrétiens, sunnites, chiites et druzes, comme père de la nation libanaise.

Avant de visiter l’Accueil Notre-Dame, où sont hébergées de nombreuses personnes malades ou handicapées, puis de quitter Lourdes en cortège officiel, Sa Béatitude a tenu à se recueillir le 9 septembre devant le petit cèdre du Liban planté dans la prairie des Sanctuaires, face à la maison Beth Maryam où sont reçus les pèlerins arabes de l’Eglise Maronite. Cette Eglise est née autour de saint Maroun, un moine qui a résisté aux hérésies des premiers siècles, en particulier à la doctrine monophysite qui niait la double nature du Christ, humaine et divine à la fois. Fidèles au Pape, les disciples de ce saint, appelés Maronites, ont très longtemps été les seuls catholiques parmi des chrétiens d’Orient dont les divisions ont facilité la progression de l’islam. Honoré du titre de patriarche d’Antioche (la ville où le nom de « chrétiens » est né pour désigner les disciples de Jésus), le patriarche des Maronites représenta au cours des siècles le seul interlocuteur fiable et loyal aux yeux de Rome, médiateur précieux en vue d’un rapprochement avec les autres communautés chrétiennes de rite oriental, parfois ralliées comme les Eglises « uniates »… C’est en fidélité à cette longue histoire que le Pape devrait sans doute se rendre au Liban pour publier l’exhortation apostolique faisant suite au synode des Eglises orientales, organisé l’an dernier à Rome.

Contact : Paroisse Notre-Dame du Liban

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