Mgr Nicolas Brouwet: peut-on demander des miracles ?
EXCLUSIF MAG – L’Église regarde l’extraordinaire avec une certaine prudence car la foi consiste à croire sans voir. Toutefois, elle ne boude pas les signes et dons de Dieu destinés à encourager les hommes dans leur chemin de foi et de conversion.
Que dit l’Église des miracles ? Pourquoi ?
Avant de parler, l’Église contemple. Elle contemple Jésus guérissant des malades, rendant la vue à des aveugles, faisant parler des muets, relevant des paralytiques, ressuscitant des morts. Et lorsque Jean-Baptiste, de sa prison, envoie ses disciples demander à Jésus s’il est bien le Messie attendu, Jésus répond : « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez : Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. » Ces miracles sont le signe que le Royaume de Dieu est inauguré et que Dieu vient sauver son peuple. C’est pourquoi les miracles nous appellent à la conversion : « si les miracles qui ont eu lieu chez vous avaient eu lieu à Tyr et à Sidon, dit Jésus, il y a longtemps que, sous le sac et la cendre, elles se seraient repenties. » Devant des miracles nous ne pouvons pas rester inactifs ou dubitatifs : ils nous interrogent en nous tirant de notre léthargie ; ils nous remettent devant le choix de Dieu, ils suscitent notre liberté face à lui.
Et pourtant aucun miracle n’est une preuve contraignante qui nous obligerait à croire et à nous mettre à la suite du Christ. Dans l’Évangile, les miracles du Seigneur laissent de marbre nombre de ses témoins. Un chef de synagogue, indigné de voir Jésus opérer un miracle le jour du sabbat, dit à la foule : « Il y a six jours pendant lesquels on doit travailler ; venez donc ces jours-là vous faire guérir, et non le jour du sabbat. » Jésus se heurte au manque de foi, au refus de croire ; Il ne peut forcer la liberté.
Un jour des pharisiens et des scribes Lui demandent un signe, c’est-à-dire un prodige qui justifierait son autorité, ses enseignements, sa mission. Cette génération répond-Il, « réclame un signe, et de signe, il ne lui sera donné que celui du prophète Jonas », c’est-à-dire la Résurrection. Le signe qui devrait convaincre est le tombeau vide. Et pourtant ce n’est pas le cas. « S’ils n’écoutent pas Moïse ni les prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. »
N’y a-t-il pas un risque à trop parler de miracle ou à les faire demander ? (car ensuite, s’il ne se passe rien, les gens sont déçus…)
Est-ce qu’on pèche par excès dans ce domaine ? Je ne le crois pas. Demander un miracle, c’est ouvrir la porte à Dieu, à qui rien n’est impossible. La question est plutôt celle de notre disponibilité à la réponse de Dieu. Nous demandons dans la foi, mais la réponse ne nous appartient pas. Nous laissons le Seigneur répondre à sa manière. Et nous nous tenons prêts à accueillir cette réponse même si le miracle ne se produit pas comme nous l’avions imaginé.
Il faut parfois vérifier la pureté de notre intention lorsque nous demandons un miracle. Nous savons bien qu’il n’est ni chrétien, ni logique d’attendre une telle intervention du Seigneur alors que nous n’avons pas pris les moyens humains habituels pour résoudre nos difficultés, obtenir notre guérison, ou franchir une étape de notre existence. À un étudiant qui demandait : “Priez pour que je réussisse mon concours dans quinze jours”, un prêtre avait répondu : “je prie surtout pour que tu aies le courage de te mettre au travail”. Une demande de miracle n’a pas de sens si l’on ne va pas consulter, si l’on ne fait pas confiance à la médecine, si l’on ne suit pas son traitement, si l’on ne se prépare pas à un examen ou à un entretien d’embauche, si on ne ferme pas sa maison à clé, si on ne part pas à l’heure pour avoir son train. Le risque est de passer d’une demande de miracle dans la foi à la tentation de mettre Dieu à notre service pour notre confort quotidien.
Sainte Bernadette, qui était infirmière dans son couvent de Nevers, “s’acquittait à la perfection de sa besogne, écrivait le médecin de la communauté, soignant ses malades avec beaucoup d’intelligence et sans rien omettre des prescriptions faites.” Elle priait évidemment pour les Sœurs dont elle avait la garde ; mais elle faisait aussi consciencieusement son travail de soignante.
Pourquoi y a-t-il autant de grâces, de signes ou de miracles à Lourdes ? Quel rôle a Marie dans l’obtention des grâces ?
À Lourdes les guérisons ont commencé très vite, dès que la source a surgi. Cette source est le signe de l’amour qui jaillit du Cœur de Jésus ; c’est un flot continu auquel les foules de pèlerins viennent s’abreuver. Si elle s’écoule au fond de la grotte, dans sa partie la plus obscure, c’est que la miséricorde du Seigneur jaillit au cœur de nos propres nuits, de nos zones d’ombre, dans notre vie de pécheurs. Les guérisons ont confirmé cela ; elles ont attiré l’attention sur la puissance de Salut qui provient du Seigneur et que Marie a rappelée à l’humanité en apparaissant sur les bords du Gave. En demandant de prier pour les pécheurs, Notre Dame se fait l’écho du dessein de miséricorde du Père pour chacun de nous ; elle nous fait également participer à sa mission de prière en nous invitant à intercéder avec elle pour toute l’humanité.
Avez-vous rencontré des personnes miraculées ? Ne risquent-elles pas de devenir des stars ? Qu’est-ce qui vous frappe chez elles ? Que deviennent-elles ensuite ?
Les personnes qui ont été guéries à Lourdes et dont le miracle a été reconnu reviennent régulièrement au sanctuaire ; d’abord pour rendre grâce, mais aussi pour continuer à se rendre à la grotte en pèlerin. Aucune n’est devenue une star. D’ailleurs elles mettent parfois un certain temps avant d’accepter de parler de leur guérison au Bureau des constatations médicales ; précisément par crainte de mobiliser l’attention sur elles-mêmes. En parlant avec elles, je suis frappé par leur vie de foi et leur humilité, même quand elles sont amenées à témoigner. Et leur témoignage est d’abord une action de grâce rendue au Seigneur. Elles voient bien que leur guérison ne peut venir que de Dieu ; et c’est ce qui les fait avancer dans la vie chrétienne.
Grâces, signes, miracles ? Comment définir chacun ? Quelles différences ou points communs ?
La grâce est un don de Dieu. Un signe révèle son action. Un miracle est une guérison inexpliquée par la science médicale et qui produit des fruits dans la vie chrétienne. Tout miracle est un don de Dieu et un signe pour la foi des fidèles. Voilà ce qui différencie et ce qui unit ces termes. C’est comme les différentes facettes d’un même évènement. Les miracles sont un don de Dieu pour susciter la foi, celle du miraculé ou celle de ceux qui l’entourent. C’est ainsi qu’ils deviennent signes de la puissance et de la sagesse de Dieu, signe de son projet de Salut pour nous.
Le Sanctuaire vient de lancer Lourdes, le journal des grâces. Pourquoi ? Qu’en espérez-vous ?
À côté des miracles officiellement reconnus par l’Église (on en compte 69 depuis les apparitions), beaucoup de pèlerins reçoivent des grâces du Seigneur pendant leur séjour à Lourdes. L’un retrouve la foi, une autre se réconcilie avec sa mère ; l’un est guéri d’une sorte de déprime chronique, l’autre se confesse pour la première fois depuis trente ans, un troisième repart sans les maux de tête qu’il avait depuis des années… Il se passe à Lourdes des choses étonnantes.
Or on ne parle que des miracles dûment répertoriés après des années d’examens. On a voulu, par prudence, ne parler de miracle que si la science n’avait absolument aucune explication possible. Mais on a laissé dans l’ombre les merveilles que Dieu ne cesse de faire dans les cœurs, dans les âmes, dans les corps. Il est temps d’en parler, de les révéler ; de témoigner que le Seigneur est puissant et que son œuvre de Salut est toujours actuelle. Voilà pourquoi j’invite les pèlerins à raconter en quelques mots les grâces qu’ils ont reçues à Lourdes pour qu’ensemble nous acclamions le Seigneur pour tant de bienfaits. Qu’ils n’hésitent pas à envoyer leurs témoignages à temoignage@lourdes-france.com
Bénédicte Drouin pour famillechretienne.fr
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