La Semaine sainte avec François
La Semaine sainte avec François : une page d’Evangile s’écrit sous nos yeux
Quelle immense grâce de vivre cette Semaine sainte à Rome, aux côtés du pape François ! Son pontificat inattendu et surprenant nous fait renaître à une vie nouvelle, en laissant derrière nous les morts enterrer leurs morts – suivez mon regard – comme Jésus l’enseigne… Le Saint-Père l’a cité mercredi, à l’audience, rappelant que si « les renards ont des terriers », le Christ n’a pas une pierre où reposer la tête (Matthieu 8, 18-22). « Jésus n’a pas de maison, parce que sa maison, ce sont les gens, c’est nous », a-t-il souligné, alors que lui-même vient de renoncer aux appartements pontificaux pour vivre simplement à la résidence Sainte Marthe, où logent les évêques de passage au Vatican. Une page d’Evangile s’écrit sous nos yeux en ce Triduum pascal.
François nous invite sans cesse à suivre Jésus « à la périphérie », à « sortir » comme lui pour chercher la brebis perdue, jusqu’à porter sur nous l’odeur de cette brebis retrouvée, comme les vrais bergers. « Vivre la Semaine sainte, c’est apprendre à sortir de nous-mêmes pour aller vers ceux qui ont besoin de compréhension, de consolation, d’aide… C’est sortir de nos manières routinières de vivre la foi qui ferment l’horizon à l’action de Dieu », notait-il à sa première audience du mercredi, le 27 mars. Les paroles de feu du nouveau pape sont pleines d’espérance pour l’Eglise et nous remettent en route.
Lors de la célébration des Rameaux, dimanche dernier, il a désigné l’ennemi par son nom, encore une fois : le diable, « bien souvent déguisé en ange »… Regardons-le, habillé de violet parfois, médire dans les cœurs jaloux qui lui obéissent, car ils sont légion ses petits suppôts destructeurs qui s’agitent avec une fausse autorité pour nous obliger à maudire. « Ne l’écoutez pas, ne vous laissez jamais prendre par le découragement, ne vous laissez pas voler l’espérance », a insisté le pape, en précisant que « la croix du Christ embrassée avec amour ne porte pas à la tristesse, mais à la joie d’être sauvés et de faire un tout petit peu ce qu’il a fait le jour de sa mort ». Dans nos existences la souffrance ne manque pas, mais vécue dans la foi elle fait de nous tous ensemble des princes d’un Roi crucifié, prêts à sortir de nous-mêmes pour aller « vers les périphéries du monde », vers les malades, les personnes seules, sans nous installer ni capitaliser des biens inutiles. Le pape argentin confie que sa grand-mère disait à ce propos : « Le linceul n’a pas de poches » ! Avis aux stériles spécialistes du marketing ecclésial et des « statistiques », ces émules du traître Judas qui n’ont que l’argent à la bouche.
Ainsi nous voilà engagés à avancer en cette Année de la foi, sur les pas de François le bien nommé, malgré les obstacles, et à penser autant que possible avec miséricorde. « Dieu pense avec miséricorde », remarque le Saint-Père qui dénonce avec force « les moralistes sans bonté » et prêche par l’exemple… Jeudi saint le pape du Nouveau Monde est allé dans une prison pour jeunes mineurs à Rome, il a lavé et embrassé les pieds de douze d’entre eux, comme Jésus le fit pour les disciples au soir de la dernière cène, en souriant à chacun avec douceur, les exhortant à se rendre service mutuellement, à s’aimer concrètement en s’entraidant. Les jeunes prisonniers de diverses origines, en larmes, bouleversés par cette « caresse de Jésus » selon l’expression du pape, feront un chemin intérieur dont Dieu seul sait la fécondité future… Des saints sortiront de l’enfer. En attendant, par son humble geste d’amour, le pape a mis en pratique ce qu’il avait dit le matin même aux prêtres romains, lors de la messe chrismale annuelle où l’huile sainte destinée aux sacrements est consacrée pour toutes les paroisses du diocèse.
Son homélie dans la basilique Saint-Pierre demeurera historiquement comme une réponse enfin donnée à la crise sacerdotale qui a dévasté l’Eglise en Occident, et produit des prélats « mondains », abuseurs du titre de « Monseigneur », adeptes des voitures de marque et soucieux de leur piètre « carrière », incapables de susciter des vocations d’apôtres. « Seule compte l’onction, et non la fonction », a lancé le pape avec conviction, mettant en garde les prêtres contre « un goût pour les vêtements » liturgiques, qui les convertit en « gestionnaires » ou en « collectionneurs d’antiquités », sans rapport avec « la présence de la gloire de Dieu resplendissant en son peuple vivant, consolé » : « L’onction n’est pas destinée à nous parfumer nous-mêmes ».
Chaque mot de François était choisi, brûlant de vérité, fracassant comme le coup de hache de Clovis au temps du vase de Soissons. « On reconnaît un bon prêtre à sa façon d’oindre son peuple… Quand nos fidèles reçoivent une huile de joie, on s’en rend compte… », a noté le nouveau pape, regrettant publiquement que « le prêtre qui sort peu de lui-même, qui oint avec parcimonie, perd le meilleur de notre peuple », même si heureusement les gens « volent » l’onction quand il le faut… En l’écoutant des visages de prêtres amis m’apparaissaient, qui ne minimisent pas l’action de la grâce, en particulier le Père Michel-Marie Zanotti, à Marseille, dont la « pastorale de la périphérie » s’inspire depuis longtemps de celle du cardinal Jorje Mario Bergoglio à Buenos Aires. Un nouveau président de la Conférence des évêques de France, élu à Lourdes début avril, prendra-t-il en compte de telles expériences prometteuses et novatrices ? Toujours est-il qu’avec ce pape la liturgie retrouve sons sens au service du peuple fidèle, et l’Evangile reprend sa place centrale, avec le respect des personnes que cela suppose, y compris dans le monde du travail…
Le retour du Christ fait la une de la presse. La révolution évangélique et mariale est en marche, elle ne s’arrêtera pas : c’est le printemps de l’Eglise. Un « coup d’Etat » sera peut-être tenté, comme à Moscou en 1991, pour empêcher les réformes en cours, mais si c’était le cas le peuple de Dieu lui-même prendrait le Vatican, pour soutenir François, ce pape libre et « invulnérable » parce que plein de grâce et de vérité.
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