Nous ne devons pas avoir peur de la bonté
«Nous ne devons pas avoir peur de la bonté, de la tendresse !»
Le monde entier était représenté ce mardi 19 mars place Saint-Pierre, en la fête de saint Joseph, patron de l’Eglise universelle, pour l’inauguration du pontificat de François. Plus de 130 délégations dont celle de l’Argentine, avec la présidente de ce pays, Cristina Fernandez Kirchner, à qui le pape a offert une rose blanche en signe de réconciliation après les différents qui les ont politiquement durement opposés. Les affiches placardées dans la rue en l’honneur du nouveau pape avaient déjà été en bonne partie dérobées, preuve de la popularité inégalée de ce pape argentin dont les premiers gestes évangéliques ont bouleversé l’opinion publique. « Francesco, sei la primavera della Chiesa », « François, tu es le printemps de l’Eglise », disait une banderole largement déployée. Alors que la pluie tombait encore sur Rome la veille, c’est un soleil radieux qui a accompagné la célébration en plein air, inondant de lumière la foule venue prier aux côtés du successeur de Pierre, agitant partout le beau drapeau argentin, bleu et blanc, frappé d’un astre rayonnant.
Avant le début de la procession d’entrée sur la place, le pape du Nouveau Monde s’est recueilli à genoux sur la tombe de Simon-Pierre, le pêcheur galiléen martyrisé il y a 2000 ans en ces lieux où s’élevait jadis le sinistre cirque de Néron. Les patriarches des églises orientales catholiques entouraient le nouveau pape, témoins de l’unité des origines vers laquelle il s’agit de revenir, en fidélité au Christ. C’est le « ministère pétrinien de l’évêque de Rome » qu’évoquait le titre du livret de la messe d’inauguration, afin que tous aient bien conscience du chemin qui s’ouvre, dans un esprit oecuménique. « Ne parlons pas d’intronisation, le pape n’est pas un roi », avait prévenu le Père Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège, et jésuite comme ce pape élu il y a moins d’une semaine. « Le roi, c’est le Christ », ajoutait-il à l’intention des journalistes. Dans le blason de François, le Christ figure d’ailleurs au centre, dans un soleil où s’inscrivent les lettres IHS – abréviation de Jésus en grec – et une croix, ainsi que les trois clous de la passion du Seigneur, et dessous une étoile représentant la Vierge Marie.
Ayant revêtu le pallium, pièce de laine rappelant l’agneau porté par le Bon Pasteur, le pape s’est avancé vers la porte de la basilique au chant des litanies des saints, en procession avec environ 200 concélébrants, pour rejoindre l’autel dressé à l’extérieur, face au peuple. L’anneau du pêcheur, fabriqué en argent et non pas en or, a été remis au pape en signe de sa nouvelle charge. Il a symboliquement appartenu à Paul VI, le pape du concile auquel François se réfère souvent, désireux d’accomplir l’œuvre de son grand prédécesseur, 50 ans après la clôture du concile Vatican II qui ouvrit les fenêtres de l’Eglise sur les réalités de ce temps. Au cours de cette messe qui se déroula dans un climat de paix profonde, l’Evangile relatant le songe de saint Joseph à propos de la Vierge Marie, son épouse, fut lu en grec, là aussi pour insister sur l’importance de garder au cœur le désir d’unité entre les chrétiens d’Orient et d’Occident, condition essentielle pour que le monde croie (Jean 17,21).
Sans effets de manche ni « one man show », d’une voix douce et ferme, rendant hommage à son prédécesseur prénommé Joseph, François a ensuite prononcé une homélie très intérieure, centrée sur la vocation chrétienne, à partir de l’appel de Dieu accueilli par l’époux de la Vierge, devenu le gardien de Marie, de Jésus, et de l’Eglise ensuite. N’a-t-il pas Joseph dans son blason d’évêque et de pape, illustré par une fleur de nard ? Discrétion, humilité, silence, présence, chacun des mots choisis par le pape pour caractériser l’attitude de Joseph paraissait en même temps définir son propre programme pastoral. « Dieu ne désire pas une maison construite par l’homme, mais il désire la fidélité à sa Parole, à son dessein ; c’est Dieu lui-même qui construit la maison », soulignait le Saint-Père, insistant sur la nécessaire disponibilité que nous devons avoir au projet de Dieu, en restant « ouvert à ses signes ».
A l’exemple de Joseph donc « nous voyons quel est le centre de la vocation chrétienne : le Christ ! », notait-il, précisant que « nous gardons le Christ dans notre vie, pour garder les autres, pour garder la création ! ». Et progressivement François en est venu à nous demander très concrètement notamment de « vivre avec sincérité les amitiés, qui sont une garde réciproque dans la confiance, dans le respect et dans le bien », et de nous rendre compte qu’au fond « tout est confié à la garde de l’homme ».
Parlant encore de Joseph, il a mis en valeur sa « grande tendresse qui n’est pas la vertu du faible, mais au contraire dénote une force d’âme ». « Nous ne devons pas avoir peur de la bonté, de la tendresse ! », s’est-il exclamé, définissant son service d’évêque de Rome comme celui de « garder tout le peuple de Dieu » en accueillant « avec affection et tendresse l’humanité tout entière, spécialement les plus pauvres ». « Seul celui qui sert avec amour sait garder », a expliqué le pape, avant de solliciter à nouveau la prière de tous pour son ministère au cours duquel il veut “ouvrir une trouée de lumière au milieu de tant de nuages » et « porter la chaleur de l’espérance ».
A la fin de la messe nous comprenions mieux sa devise, inspirée de la vocation de saint Matthieu commentée par Bède le Vénérable : « Miserando atque eligendo », ce qui veut dire en substance « en faisant miséricorde et en choisissant de le faire ». Il nous invite à décider d’être miséricordieux, d’en avoir la volonté, et le courage, pour que le monde change autour de nous. La manière d’être de François, le pape de la Miséricorde, reflète tellement l’amour inconditionnel du Christ qu’il va sans doute faire se lever de nombreuses vocations à la sainteté dans l’Eglise.
Samedi le pape ira visiter Benoît XVI à Castel Gandolfo, où ils parleront probablement du dossier secret issu de l’enquête qui a fait suite aux fuites de documents dans la presse, les Vatileaks. Les décisions importantes, et des nominations suivront, mais François va d’abord présider les célébrations de la Semaine Sainte, fin mars, et au sortir du carême l’Eglise avec lui semble vraiment promise à renaître.
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